Les droits territoriaux autochtones et la célébration du Jubilé au Canada

dimanche le 24 septembre 2000

Des responsables d’Églises chrétiennes invitent à réfléchir sur les réclamations territoriales des Autochtones.

Il vint à Nazareth où il avait été élevé. Il entra suivant sa coutume le jour du sabbat dans la synagogue, et il se leva pour faire la lecture. On lui donna le livre du prophète Ésaïe, et en le déroulant il trouva le passage où il était écrit :

L’Esprit du Seigneur est sur moi parce qu’il m’a conféré l’onction pour annoncer la Bonne Nouvelle aux pauvres. Il m’a envoyé proclamer aux captifs la libération et aux aveugles le retour à la vue, renvoyer les opprimés en liberté, proclamer une année d’accueil par le Seigneur. (Luc 4,16-19)

Chères soeurs et chers frères en Christ,

1. Un nouveau millénaire commence. Et nous éprouvons toutes et tous le désir de repartir à neuf, désir qui s’exprime de milliers de façons selon nos diverses traditions humaines. Pour les chrétiennes et les chrétiens, le moment est particulièrement stimulant puisqu’il marque le deux millième anniversaire de la naissance de Jésus dans l’histoire humaine. Dans de tels moments d’ouverture à la délivrance et au renouveau, l’action de grâces pour les dons reçus et le repentir de nos péchés passés nous amènent à prendre de nouveaux engagements. Plusieurs chrétiennes et chrétiens expriment leur espérance d’un nouveau départ en regardant cette période comme un Jubilé pour aujourd’hui, dans l’esprit de renouvellement du Jubilé biblique proclamé au chapitre 25 du Lévitique.

Au Canada, un domaine particulier de notre vie nationale réclame à grands cris guérison et transformation : le temps est maintenant venu de changer les relations entre la société majoritaire et les peuples autochtones.

2. Quatre ans déjà depuis le dépôt du très complet rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones ; plus de trois ans après la réponse officielle du gouvernement fédéral.(1) Pour le Canada, les recommandations de cette Commission royale représentent, tout à la fois, un grand défi et une grande espérance. Cette dernière – la reprise en mains progressive par les peuples autochtones de leur bien-être social, économique et politique – est inséparable des conclusions du rapport concernant les droits territoriaux autochtones. Cependant, malgré cette charte de l’espoir, on a assisté, ces dernières années, à l’échec du mécanisme mis en place par le gouvernement fédéral pour satisfaire les réclamations territoriales.

3. Pour le moment, tout le processus de négociation des traités en Colombie-Britannique est menacé d’échec, et les organisations autochtones se tournent de plus en plus vers les cours de justice, seule façon de trouver réponse à leurs réclamations séculaires. La nation Nisga’a a finalement pu conclure un traité longtemps recherché avec le gouvernement fédéral et les autorités provinciales, mais l’accord négocié a donné lieu à des réactions négatives de la part de partis politiques et d’organisations qui le trouvent préjudiciable à leurs droits. Provoquée par les longues étapes menant au règlement des droits territoriaux autochtones, l’impatience, chez les autorités et dans le peuple, a conduit à la violence à Ipperwash en Ontario, à Burnt Church au Nouveau-Brunswick, et à du vandalisme, ailleurs.

4. Les questions touchant les terres et les droits autochtones sont complexes ; elles ont des conséquences sur les projets futurs et la vie quotidienne des peuples autochtones dont les terres ancestrales sont en jeu ; elles affectent aussi les projets de plusieurs autres Canadiennes et Canadiens qui dépendent de modèles économiques actuellement en vigueur. Mais le problème perdure depuis des décennies, même si la légitimité des réclamations est reconnue par nos plus hautes cours et sa gravité, soulignée par de nombreuses études. Comment cela se fait-il que le Canada en soit arrivé à cette impasse, rendant presque impossible la conclusion et la mise en pratique d’accords sur les droits des nations autochtones à leur terre et à leurs ressources ?

5. La situation dans laquelle les nations autochtones vivent dans le pays aujourd’hui est une honte pour le Canada sur le plan international. Elle témoigne clairement, même si silencieusement, d’une histoire d’injustice. Selon l’Index de développement humain des Nations unies, la majorité de la société canadienne bénéficie de la plus grande qualité de vie de tous les pays du monde. Les chefs politiques s’enorgueillissent souvent de cette évaluation. Mais, selon les mêmes normes onusiennes, les conditions des peuples autochtones au Canada, prises isolément, placeraient cette population au 63e rang des nations du monde. Dans les communautés autochtones, le taux de suicide est six fois plus élevé que la moyenne canadienne, le taux de tuberculose, 25 fois plus élevé, et le taux de mortalité infantile, trois fois plus élevé. Même si seulement 3 % de la population canadienne est d’origine autochtone, 14 % des prisonniers sont autochtones. Comme l’a montré la Commission royale sur les peuples autochtones, cette épouvantable situation est, dans son ensemble, directement liée au fait que la plupart des communautés autochtones n’ont pas suffisamment de territoire et de ressources. Il est temps que tous, Canadiennes, Canadiens, de même que nos gouvernements, nous fassions quelque chose et changions cette situation de péché social.

6. Pour les gens de foi que nous sommes, les sérieux problèmes de la vie de la communauté nous poussent toujours à chercher la lumière de Dieu pour découvrir ce que la justice exige de nous. En cette année millénaire, quelquefois appelée année du grand Jubilé, plusieurs chrétiennes et chrétiens de partout dans le monde se rappellent un enseignement particulier tiré de l’Écriture hébraïque, particulièrement importante pour notre maître Jésus. Cet enseignement est en lien avec l’année du Jubilé biblique. Il jette un éclairage permettant de découvrir et de renouveler toute la question de la terre et du droit à la terre.

L’année du Jubilé, célébrée une fois par génération (après sept fois sept années sabbatiques), c’était l’occasion pour le peuple de Dieu de redécouvrir la vision propre à l’alliance de Dieu avec Israël. Cette loi de l’alliance repose, en effet, sur la vérité que toutes les choses créées appartiennent finalement à Dieu, et que ce dernier, en nous confiant toutes choses, nous a commandé que nous aimions notre prochain comme nous-mêmes. La fidélité à l’alliance de Dieu comprend la vigilance à combler les fossés entre riches et pauvres – fossés s’élargissant chaque fois que l’esprit de l’alliance faiblit. L’histoire humaine, avec son poids de péché, produit des iniquités et des injustices. Mais la sagesse biblique insiste sur le fait que grâce au pardon divin, les structures injustes, une fois en place, ne doivent pas inévitablement garder les personnes enchaînées pour toujours. Le repentir et le changement ont toujours leur place.

7. Dans son premier sermon public à Nazareth, Jésus a rappelé à ses auditeurs cette vérité fondamentale concernant la vie de l’alliance avec Dieu. En choisissant un texte du livre d’Ésaïe(2), Jésus place symboliquement la proclamation du Jubilé au coeur de sa propre mission, lui, le béni de l’esprit du Seigneur pour « porter joyeux message aux humiliés…proclamer l’année de la faveur du Seigneur ».

8. Pourquoi le Jubilé biblique était-il un « joyeux message » pour les pauvres, et pourquoi était-il, comme le Lévitique le dit, un temps où « vous proclamerez dans le pays la libération pour tous les habitants » ? L’année du Jubilé commandait un repos par rapport au statu quo (laisser la terre en jachère dans une société agricole), une restauration de la communauté (libérer les esclaves des liens dus à la dette et les rétablir dans leur responsabilité au sein de la communauté économique) et un renouveau des relations entre les personnes elles-mêmes ainsi qu’entre les personnes et la création. Les moyens concrets de ce renouveau prenaient la forme de la remise de leur terre agricole (moyen de gagner sa vie) à ceux qui, au cours des 50 années précédentes, avaient perdu leur terre au profit de voisins plus prospères. À chaque génération, le Jubilé invitait donc tout fils ou toute fille de l’alliance à restaurer une vie d’égalité, de responsabilité, de liberté et de bon voisinage sur la terre reçue gratuitement, témoignage de confiance de la part du Créateur.

9. Les sociétés autochtones ont elles aussi célébré des rituels rappelant certains éléments du Jubilé biblique. Peut-être le plus connu est-il le potlatch célébré par les Kwakuitls, les Nootkas, les Salishs, les Haidas, les Nisga’as, les Gitksans et d’autres peuples du Nord-Ouest. On célébrait ce rituel lors d’importants événements pour redistribuer la richesse et témoigner d’une solidarité sociale et économique. Dans ce qui est aujourd’hui le Canada central, les sociétés algonquines célébraient une fête à laquelle se joignaient des gens venus de très loin. On y échangeait fourrure, maïs, sirop d’érable et (plus tard) bouilloires et outils. Même les ancêtres décédés faisaient partie du partage renouvelé de la vie : on déterrait leurs os des monticules funéraires et on les replaçait, symbole de la nécessaire réorganisation de leur statut parmi les vivants ; les communautés célébrantes répondaient ainsi à l’idéal de justice et d’égalité de leur nation.(3)

10. Au Canada, quand nous regardons ce que, de toute urgence, nous devons contester et changer dans notre vivre ensemble, ce sont nos échecs à respecter les peuples autochtones qui nous interpellent le plus fortement. Ici, en ce moment historique, la justice jubilaire doit inclure le travail consacré à établir un nouveau rapport, plus respectueux, avec la terre et ses premiers habitants

11. Comme Églises chrétiennes du Canada, nous avons nos propres raisons de prier pour notre conversion et notre guérison en ce qui concerne notre vie partagée avec les peuples autochtones. Certaines de nos Églises sont arrivées dans cet hémisphère avec les pouvoirs impériaux trop souvent devenus les ennemis vainqueurs des peuples autochtones. Même ces autres groupes chrétiens, arrivés plus tard ou n’ayant jamais eu ce type de pouvoir et de privilèges, que d’autres églises mieux « établies » ont pris pour acquis, reconnaissent que la domination coloniale des peuples autochtones les a affectés eux aussi.

Pour plusieurs d’entre nous, membres d’Église, la relecture de l’histoire canadienne, au cours des récentes années, sous l’angle particulier des dommages faits aux nations autochtones par le colonialisme européen, nous a fait découvrir le péché en nous-mêmes et dans nos institutions. Nous n’étions pas préparés à cela. Ce fut une expérience douloureuse et humiliante. Mais aussi une grâce qui a rendu possible une sorte de repentir collectif. Cette conscience repentante s’est exprimée, par exemple, dans les demandes publiques de pardon faites par les quatre Églises historiquement impliquées, au nom du gouvernement fédéral, dans l’administration des écoles résidentielles pour autochtones. Nous sommes peinés que les Églises se soient associées aux politiques assimilatrices des gouvernements canadiens et de la société canadienne dans son ensemble.

12. Mais dans notre peine, nous nous souvenons que l’histoire humaine est aussi le lieu de la véritable bonté humaine. Plusieurs chrétiennes et chrétiens ont à la fois servi et découvert Dieu en vivant parmi les peuples autochtones, et nous ont laissé un héritage digne de reconnaissance. La présence, partout au pays, de communautés chrétiennes autochtones profondément enracinées constitue l’encourageant héritage de la longue marche des Églises avec les peuples autochtones. Le respect que les Églises leur vouent, et le leadership croissant des leaders chrétiens autochtones dans la grande communauté chrétienne, démontrent que la guérison et la réconciliation sont en train de devenir réalité grâce à notre commune action pour le changement.

13. Les pressions cuméniques pour changer les politiques canadiennes ont constitué une façon pour les Églises de se joindre aux chefs autochtones pour proposer des changements spécifiques qui leur sont apparus urgents. Au milieu des années 1970, les Églises ont créé le Projet Nord pour aider les nations autochtones des Territoires du Nord-Ouest à trouver satisfaction dans leurs réclamations territoriales, avant que les immenses projets pétroliers et gaziers n’envahissent leurs territoires traditionnels. Ce travail se poursuit dans les efforts de l’Aboriginal Rights Coalition, qui appuie activement, dans leurs luttes de réclamation territoriale, des nations comme celles des Innus, des Gitksans et des Lubicons, pour n’en nommer que quelques-unes.

14. En 1987, neuf responsables religieux canadiens ont signé le document intitulé Une nouvelle alliance(4). Dans cet appel historique, ils invitaient à de « nouveaux départs » avec les peuples autochtones, particulièrement par la reconnaissance et la protection constitutionnelles des gouvernements autochtones autogérés. Comme il est dit dans le document, les négociations constitutionnelles de la décennie 1980 fournissaient « une occasion de rectifier des injustices historiques et de reconnaître les droits des peuples autochtones dans la Constitution canadienne. C’est l’occasion de conclure une nouvelle alliance avec les premiers peuples et nations du Canada. »

15. Aujourd’hui, en l’an 2000, guidés par les conseils des communautés autochtones, nous renouvelons notre invitation en faveur d’une nouvelle alliance. Notre message collectif s’adresse aux membres de nos Églises et, en fait, à toutes les Canadiennes et tous les Canadiens préoccupés du bien commun. Nous les invitons instamment à favoriser l’atteinte d’un objectif fondamental poursuivi par la Commission royale sur les peuples autochtones : l’octroi aux Premières Nations d’un territoire adéquat, avec des ressources suffisantes pour développer des économies viables.

16. Notre analyse de la situation actuelle des négociations entourant les réclamations territoriales au Canada nous conduit à l’implacable conclusion que l’actuel processus ne fonctionne pour personne. Les négociateurs gouvernementaux semblent encore se référer à la politique d’extinction(5) dont pourtant d’importantes études ont démontré la faillite et la malignité. Dans son ensemble, la politique de résolution des réclamations autochtones(6) est tellement déficiente que nous avons perdu presque tout espoir de voir se négocier des traités. En ce qui concerne le travail de la Commission des réclamations autochtones chargée de répondre à des réclamations spécifiques, le processus est si lent et si insatisfaisant qu’il n’y a presque plus d’espoir de règlement. Même les commissaires ont menacé de donner leur démission.

17. La première responsabilité dans la libération et la guérison des communautés autochtones repose, évidemment, sur les épaules des autochtones eux-mêmes. Néanmoins, toute citoyenne, tout citoyen du Canada hérite d’une part de responsabilité dans cet important dossier. Une partie du travail à faire : l’élaboration d’une plate-forme de politique publique, juste et solide, sur laquelle les nations autochtones pourraient s’appuyer pour construire un avenir nettement meilleur pour leurs communautés.

Au Canada, il faut relancer à nouveau les négociations sur les droits territoriaux et issus de traité. Nous sommes conscients que nous avons recherché une opinion autorisée sur la façon de procéder et que les représentants gouvernementaux ont accepté les termes suggérés par les nations autochtones pour un tribunal indépendant des réclamations. Ce que nous espérons encourager, par cette lettre et par d’autres moyens, c’est que grandisse, dans le coeur des Canadiennes et des Canadiens, un généreux sentiment d’urgence morale. Cette difficile et délicate tâche de négocier de nouveaux traités, de satisfaire aux réclamations spécifiques et de modifier les modèles économiques ancrés, doit être portée par un important courant d’intérêt public et de vision partagée et pleine de respect. Nous prions pour que se crée un tel courant sur notre terre.

18. Nos traditions religieuses nous rappellent que, dans tout ce domaine, nous marchons sur une terre sacrée et entrons en contact avec Dieu et sa façon d’entrevoir la transformation de la communauté humaine. Dans la bible, on voit dans la restitution pacifique de la terre à ceux qui avaient été opprimés une dimension fondamentale du plan rédempteur de Dieu. Au commencement, – ainsi le voit la Genèse – la terre était pour tout le monde. Après le péché humain, la situation commence à se détériorer : nous assistons à des guerres pour la terre, et à l’accumulation de la terre par les puissants qui peuvent choisir de créer l’inégalité. Une terre pour un peuple sortant de l’esclavage et de l’oppression, c’est, par ailleurs, la joie entrevue dans la grande histoire de l’Exode. De nombreuses lois, parmi les plus contraignantes des livres de l’Exode, du Lévitique et du Deutéronome – des lois contre l’intérêt sur les prêts, des lois sur le non-recouvrement d’une dette dans certaines circonstances, la législation du Jubilé elle-même – visaient essentiellement à garder les familles plus pauvres en possession de leur terre ancestrale.

19. Les écrivains bibliques savaient bien à quel point il est difficile de maintenir un partage de la terre, équitable, pacifique, ressemblant à une alliance, dans un monde déformé par l’égoïsme et les habitudes de domination. Dans la bible, de nombreux passages des prophètes, des psaumes, et des livres historiques montrent combien cette conscience était vive(7). Le psaume 37, par exemple, présente la difficulté de la foi à croire que Dieu va l’emporter sur les forces très clairement opposées au projet divin d’un partage pacifique de la terre.

Jésus place ce psaume 37 au centre de sa propre proclamation de la guérison, par Dieu, de la communauté humaine : « Heureux les doux ; ils auront la terre en partage » – les mots mêmes du psaume 37 – font partie du très renommé sermon sur la montagne(8). Cela nous aide à nous rappeler que le mot hébreu traduit ici par « doux » signifie aussi « opprimé ».

20. Dans la mystérieuse logique de la prophétie biblique, il est clair que la terre espère que la justice divine fleurira parmi le peuple. Pour les prophètes, injustice, violence et refus d’amour du prochain font que la terre s’atrophie et devient stérile(9). Il y a un lien, établi dans la dynamique de la création, entre justice restaurée au profit « des pauvres de la terre » et la guérison de la terre elle-même. (En termes modernes, la justice sociale et la restauration environnementale sont deux dimensions d’une même démarche.)

21. La reconnaissance et le juste respect des droits territoriaux autochtones au Canada représenteront une tâche difficile. Néanmoins, c’est un objectif rempli de promesse. La bataille pour y parvenir peut corriger les distorsions vieilles et injustes de la structure même de notre pays. Cette reconnaissance peut restaurer la confiance, la responsabilité, la vision et la ferveur des peuples autochtones, et transformer, chez les jeunes autochtones, leur façon d’entrevoir ce que le futur leur réserve. La diversité des peuples autochtones, et la variété des situations qu’ils vont hériter, pourraient susciter des modèles innovateurs de développement économique et humain – peut-être beaucoup plus durables, beaucoup plus respectueux de la terre et de la communauté humaine que le sont les modèles économiques et technologiques qui dominent et dont nous sommes prisonniers.

22. Pour participer à ce grand effort, toutes les Canadiennes, tous les Canadiens devront bannir de leur coeur le racisme, l’indifférence, le désespoir et le repli sur soi. Tout en appelant les chrétiennes et les chrétiens du Canada à épouser la cause des droits territoriaux autochtones, nous demandons à Dieu de convertir nos coeurs, et d’ensemencer notre terre de cette justice, de cet amour et de ces rapports de bon voisinage qui vont sauver l’avenir de l’humanité.

23. L’Initiative cuménique canadienne pour le Jubilé (coalition de 30 organisations liées aux Églises, sur le point d’entreprendre la troisième année de sa campagne publique d’éducation à la justice) fait circuler une pétition demandant au Premier Ministre d’agir et d’initier une nouvelle démarche de reconnaissance des territoires réclamés et des droits inhérents. Comme responsables d’Église, nous donnons notre entier appui à cette pétition.

24. Enfin, nous vous invitons toutes et tous à prier avec nous pour que Celui qui demeure avec l’humanité, Celui qui « va sécher les larmes de leurs yeux » bénisse les efforts de tous ceux et celles qui collaborent à cette recherche, importante et à plusieurs niveaux, d’une juste réconciliation des droits de tous les habitants de cette terre. Puissent nos efforts humains être inondés par la grâce du Seigneur dans l’énergie de la promesse divine dans laquelle nous sommes invités à placer notre confiance pour un avenir plus heureux ! « Voici, je fais toutes choses nouvelles. » (Ap 21,5)

Cet appel à la réflexion a été rendu public le 25 septembre 2000 à Ottawa, Canada.

Signataires :

Rev. Michael Peers, Primat, Église épiscopale du Canada

+ Mgr Gerald Wiesner, o.m.i., Évêque de Prince George Président, Conférence des évêques catholiques du Canada

Anne-Marie Savoie, r.h.s.j., Présidente, Conférence religieuse canadienne

Kim Foster, Présidente, Conseil unitarien du Canada

Gordon Pols, Secrétaire Exécutif, Conseil des Églises chrétiennes réformées du Canada

Rev. Telmor Sartison, Église évangélique luthérienne au Canada

R.P. David Nazar, s.j., Supérieur Provincial, Jésuites du Haut-Canada

Ron Dueck, Président, Comité central mennonite du Canada

Claude Champagne, o.m.i., Président, Conférence oblate du Canada

Glen Davis, Président, Église presbytérienne au Canada

Gordon McClure, Clerc, Société religieuse des Amis (Quakers) du Canada

Marion Pardy, Modérateur, Église unie du Canada

1. Canada, Commission royale sur les peuples autochtones, À l’aube d’un rapprochement1996 ; Gathering Strength, Ministère des Affaires indiennes et du Nord Canada, 1997.

2. Voir Ésaïe, chapitre 61, versets 1-2, que Luc incorpore dans son récit (Luc 4,16-21) du sermon de Jésus.

3. Indigenous Perspectives of Jubilee, Menno Wiebe, Aboriginal Rights Coalition. Sans date.

4. Une nouvelle alliance, 5 février 1987.

5. Toute la politique du gouvernement fédéral concernant les réclamations territoriales exige des peuples autochtones qu’ils échangent leurs droits et leur titre d’autochtones contre des droits issus de traités. Les peuples autochtones se refusent à cela parce qu’ils croient qu’on leur demande de renoncer à leur titre d’autochtone et, ce faisant, de renoncer à leur identité d’autochtone. Indian Claims Commission, The Facts on Claims, 1999.

6. Il y a réclamations globales dans les cas où une communauté autochtone revendique des droits autochtones et un titre sur un territoire, dans des régions où il n’y a pas eu de traité de reddition. La plupart de ces réclamations se font en Colombie-Britannique, d’autres, à Terre-Neuve, dans certaines parties du Canada Atlantique, au Québec et au Yukon. Ibid.

7. Sur ce point, deux textes prophétiques célèbres : Ésaïe 5,8-10 et Michée 2,1-2. Un exemple frappant de la façon dont les plus pauvres perdent leur terre quand l’alliance de Dieu n’est pas respectée : l’histoire de la vigne de Naboth au temps du roi Akhab et de la reine Jézabel en I Rois 21. Pour un exemple de la situation inverse – l’annulation des dettes et la restitution des terres en temps de repentir et de réforme – voir Néhémie 5,1-13

8. Mt 5, 5

9. Un aperçu lointain de cette conviction se trouve en Genèse 4,1-12, l’histoire de Caïn, où on prédit que le sol « ne (te) donnera plus sa force » à la personne qui a répandu le sang de son frère. Dans l’histoire du déluge, au temps de Noé, le texte dit que « la terre s’était corrompue devant Dieu et s’était remplie de violence… car toute chair avait une conduite perverse sur la terre.» (Gn 6, 11-12). Les prophètes et les psaumes méditent souvent sur la façon dont « la terre a été profanée sous les pieds de ses habitants, car ils ont …rompu l’alliance perpétuelle » (És 24,5). Cependant, Dieu restaure la justice, alors « et notre terre donne sa récolte. » (Ps 85,12). Dieu dit :« Je répondrai à l’attente des cieux et eux répondront à l’attente de la terre. Et la terre, elle, répondra par le blé, le vin nouveau, l’huile fraîche, et eux répondront à l’attente d’Izréel. Je l’ensemencerai pour moi dans le pays. » (Os 2, 23-25)


Source : Sylvain Salvas
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