Message pastoral du Conseil catholique autochtone pour la réconciliation pour la Journée nationale de prière pour les peuples autochtones

jeudi le 24 juillet 2008

Fête de Notre-Dame de Guadalupe

Le 12 décembre 2007

1. Quand la Vierge Marie apparut à Juan Diego, les 9, 10 et 12 décembre 1531, elle s’adressa à lui avec compassion, lui parlant comme au « plus humble de mes fils », d’après le dialogue conservé dans le Nican Mophua. Juan Diego ne se sentait pas digne d’être son messager pour transmettre des observations à l’évêque, Monseigneur Juan de Zumarraga. Et de fait, lorsque l’évêque refusa de croire l’Indien qui lui affirmait avoir rencontré Marie et avoir reçu d’elle un message, Juan Diego perdit courage. Il demanda à Marie d’envoyer quelqu’un d’autre, quelqu’un de plus important et de plus respecté. Marie lui répéta qu’elle aurait fort bien pu demander quelqu’un d’autre mais que c’est lui qu’elle avait choisi pour aller parler à l’évêque afin de faire ériger une chapelle où elle puisse consoler les gens. Or Marie avait parfaitement conscience de la violence que subissaient Juan Diego et ses compatriotes aux mains des conquérants espagnols.

2. Le matin du 12 décembre 1531, la Vierge demanda à Juan Diego d’aller lui cueillir une brassée de fleurs sur la colline de Tepeyac, elle en ferait un bouquet. Elle lui demanda ensuite d’aller porter à l’évêque ce bouquet de fleurs, arrangées dans sa tilma (son manteau), comme un signe. Elle faisait de Juan Diego son ambassadeur, elle avait pleine confiance en lui. Je te commande expressément, lui dit-elle, de n’ouvrir ton manteau qu’en présence de l’évêque; c’est à lui que tu feras connaître et que tu révéleras ce que tu transportes. Tu lui raconteras tout; tu lui diras comment je t’ai envoyé cueillir des fleurs au sommet de la colline, et tout ce que tu as pu voir et admirer. C’est ainsi que tu arriveras à changer le cœur du seigneur des prêtres pour qu’il prenne ses responsabilités et fasse construire le temple que j’ai demandé. Grâce à l’image miraculeuse et à la réception du message de Marie, en une dizaine d’années à peine [1531-1541], il y eut neuf millions de conversions à la foi catholique chez les indigènes du Mexique. L’apparition de Marie accomplissait ce que les missionnaires et les Espagnols n’avaient pu obtenir: convaincre les autochtones de devenir disciples de Jésus.

3. Le pape Jean-Paul II a visité le Canada en 1984. Le 10 septembre, il rencontrait les autochtones rassemblés au sanctuaire de Sainte-Anne-de-Beaupré.

Votre rencontre de l’Évangile, leur dit-il,  non seulement vous a enrichis, mais elle a enrichi l’Église. Nous savons bien que cela ne s’est pas fait sans difficulté, et parfois même sans maladresse. Cependant, vous en faites l’expérience aujourd’hui, l’Évangile ne détruit pas ce qu’il y a de meilleur en vous. Au contraire, il féconde comme de l’intérieur les qualités spirituelles et les dons qui sont propres à vos cultures. D’autre part, vos traditions amérindiennes et inuit permettent de nouvelles expressions du message du salut et nous aident à mieux comprendre à quel point Jésus est Sauveur et son salut catholique, c’est-à-dire universel.

4. Lors de la canonisation de Juan Diego, le 31 juillet 2002, le pape Jean-Paul II voulut rappeler aux fidèles rassemblés dans la basilique de Guadalupe  que

L’événement de Guadalupe – comme l’a souligné l’épiscopat mexicain – signifia le début de l’évangélisation avec une vitalité qui dépassa toutes les attentes. Le message du Christ, à travers sa Mère, reprit les éléments centraux de la culture autochtone, les purifia et leur donna leur signification définitive de salut" (14 mai 2002, n. 8). C’est pourquoi Guadalupe et Juan Diego revêtent une signification ecclésiale et missionnaire profonde et sont un modèle d’évangélisation parfaitement inculturée… Juan Diego, en accueillant le message chrétien sans renoncer à son identité autochtone, découvrit la profonde vérité de la nouvelle humanité, dans laquelle tous sont appelés à être fils de Dieu.

5. Cette année, nous avons vu conclure un chapitre de la vie des autochtones qui ont fréquenté les pensionnats indiens ouverts par le gouvernement fédéral et les églises. On a commencé de verser une indemnité aux anciens étudiants, à leurs familles et à leurs communautés. Nous savons que les ressources financières ne seront pas le seul facteur de guérison. Toutefois, il devient maintenant possible de reprendre, sur cette route sacrée, une démarche de réconciliation et de paix. La progression ne sera pas facile. Mais le besoin de guérison spirituelle ne va pas s’estomper. Dans l’Ancien Testament, le prophète Isaïe parlait en ces termes du serviteur souffrant [Jésus] (53, 5) :

 Il a été transpercé à cause de nos péchés, écrasé à cause de nos crimes. Le châtiment qui nous rend la paix est sur lui et c’est grâce à lui que nous sommes guéris.

6. Le même passage est repris dans le Nouveau Testament en 1 Pierre 2, 24. Nous sommes les frères et sœurs de Jésus. Nous avons besoin de nous unir aux autres chrétiens pour avancer ensemble sur la voie de la réconciliation. Les évêques, les prêtres et les anciens autochtones doivent faire preuve de leadership et travailler de concert pour que nous puissions retrouver notre unité et notre intégrité. Il nous faut revenir aux enseignements spirituels que notre Créateur a donnés à nos Anciens. Ces enseignements sacrés doivent être reconnus et acceptés par nos frères et sœurs chrétiens. Le message du pape Jean-Paul II sur l’inculturation de nos valeurs spirituelles dans l’Église catholique, qui a débuté le 12 décembre 1531 lors de la rencontre entre Marie et Juan Diego, doit devenir réalité. Nous sommes tous appelés par Marie, Notre-Dame de Guadalupe,  à être ses ambassadeurs et à accueillir Jésus dans notre vie. En ce cinquième anniversaire de la Journée nationale de prière pour les autochtones au Canada, nous nous unissons dans la prière et en solidarité spirituelle pour célébrer de différentes façons l’évangélisation de notre histoire. La fête de Notre-Dame de Guadalupe, en ce 12 décembre 2007, nous rappelle une fois encore qu’elle est notre mère, la patronne des Amériques. Elle veut nous conduire à la suite de son fils Jésus.