Lettre du Président de la CECC au Ministre de la Justice et Procureur général du Canada sur l'aide médicale au suicide

vendredi le 22 mai 2015


Cher Monsieur le ministre,

Pour faire suite à la décision rendue par la Cour suprême du Canada le 6 février dernier, les évêques catholiques du Canada ont accueilli favorablement la nouvelle que vous avez annoncée pendant des entrevues médiatiques le mois dernier que le gouvernement fédéral révélera bientôt les détails de ses consultations publiques dans le cadre de la nouvelle législation sur le suicide assisté. Il y a quelques semaines, mes frères évêques et moi avons également remarqué des rapports dans les médias où vous disiez que bien que la consultation n’avait pas été formellement annoncée, elle avait été amorcée.

Notre Église et notre Conférence sont profondément préoccupées des répercussions de la décision de la Cour. Les termes classiques du serment d’Hippocrate obligent les médecins praticiens de protéger les patients « de tout mal et de toute injustice », et de ne « remettre à personne du poison », si on le demande, ni de prendre « l’initiative d’une pareille suggestion ». La décision de la Cour mine non seulement l’estime qu’a la société à l’égard de la vie humaine, mais également l’assurance et la confiance de toutes les personnes, surtout celles qui sont plus vulnérables, envers les membres du personnel médical et les établissements de soins de santé de protéger leurs vies. De plus, comme la Cour elle-même l’a noté, le Parlement, de même que les assemblées législatives provinciales et les collèges des médecins doivent maintenant trouver des moyens pour empêcher que cette décision n’affecte les droits des médecins garantis par la Charte, et pour répondre à ce qui est devenu un urgent besoin de protéger tous les travailleurs et les gestionnaires de la santé d’être forcés à fournir, ou d’appuyer, l’aide médicale au suicide.

Les catholiques ont un engagement et une participation indéfectibles dans les soins de santé. Aujourd’hui, notre pays bénéficie des services de plusieurs établissements catholiques de soins de santé, et une grande portion des hôpitaux qui sont maintenant administrés au niveau de la province proviennent à l’origine du travail et du dévouement de communautés religieuses catholiques, dont certaines d’entre elles remontent au tout début de ce qui est aujourd’hui le Canada. Même dans les établissements non catholiques, on retrouve parmi les professionnels de la santé un grand nombre d’hommes et de femmes dévoués qui appartiennent à l’Église catholique. Compassion et soins pour les malades, les mourants et les personnes économiquement et socialement vulnérables sont au cœur du travail de miséricorde de notre Église.

Tout comme les dirigeants et les membres de plusieurs autres communautés confessionnelles, nous aussi sommes profondément troublés par la décision de la Cour suprême et inquiets des répercussions que pourraient avoir une nouvelle législation créée pour appliquer cette décision.

Notre Conférence demande respectueusement d’être parmi les organismes qui seront consultés par le Gouvernement du Canada dans le cadre de cette question, tant pour s’assurer que la loi protégera la vie et la santé de tous dans la plus grande mesure possible, que pour s’assurer qu’elle offrira également une protection complète des droits et de la liberté de conscience des travailleurs et des gestionnaires de la santé. Nous vous serions reconnaissants de nous faire parvenir dans les meilleurs délais des renseignements supplémentaires concernant la date à laquelle les consultations publiques débuteront, la manière dont elles se dérouleront, et la meilleure façon pour nous de participer aux réflexions et aux discussions qui ont déjà été entamées, ou qui le seront sous peu, par le ministère de la Justice ou d’autres ministères du gouvernement fédéral.

Je vous remercie, M. MacKay, de considérer notre demande. Mes frères évêques et moi avons hâte de recevoir votre réponse.

Alors que vous aiderez notre pays à réagir à la décision la plus troublante de la Cour, je saisis cette occasion pour vous assurer de nos prières et vous prie d’agréer mes plus respectueuses salutations dans le Christ Notre Seigneur.

+Paul-André Durocher
Archevêque de Gatineau
Président de la Conférence des évêques catholiques du Canada